cavalier "d'instinct"
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Pierre,
Je rebondis sur votre intervention dans laquelle vous déclariez « n’être qu’un instinctif » par opposition au « littéraire » et au « scientifique »…
:-)
Tout d’abord, à la lecture de vos interventions, je trouve que votre jugement est réducteur, car de toute évidence, vous avez des références d’une part, et du vécu de l’autre, ce qui ne fait pas de vous un « authentique instinctif. »
Mais cette notion « d’instinctif » est une notion sur laquelle j’aimerais bien qu’ensemble nous nous attardions.
Il y a quelque temps de cela, une cavalière, s’arrêtant devant moi, mortel piéton, me dit très sérieusement : « moi, je monte à l’instinct. »
En l’observant, je réalisai vite que « son instinct la trompait lourdement. » Par exemple, son instinct de bipède l’amenait à tirer sur la main, ou à avancer le tronc pour, en quelque sorte, générer le départ au galop comme on se met parfois en danseuse sur un vélo dont le braquet est trop important.
Peut-on monter « d’instinct », c’est à dire monter sans aucune autre référence que ses propres sensations ?
Le premier cavalier de l’Histoire du monde a certainement monté d’instinct, mais il ne se trouvait personne pour lui dire alors qu’il existait mieux ; lorsque le fils a monté à son tour, il a bénéficié de l’enseignement du père, ou de la muette prédication de son contre-exemple…
:-)
Plus près de nous, la légèreté des mors du XVIII ème siècle heurterait beaucoup notre sensibilité, et il suffit de relire les écrits d’alors quant aux châtiments à infliger au cheval, pour se convaincre que la légèreté est chose relative. Mais la différence d’avec le premier cavalier de l’Histoire du monde, c’est que La Guérinière, par exemple, se savait léger par rapport aux références existantes.
Comment, d’instinct, régler le problème de l’infléchissement d’un cheval, qui n’est pas à traiter comme on traite celui du cheval qui se traverse ?
On a dit que Napoléon gagnait ses batailles « d’instinct »,ou, disons « intuitivement. » C’est faire injure à tout chef militaire que de penser qu’il peut « jouer » la vie de ses hommes sur un « coup d’instinct. »
Pourquoi s’instruire pour vaincre ? (devise de l’Ecole Militaire)
En s’instruisant, non seulement on développe l’esprit critique, ce qui est une chose, mais surtout, on fait passer dans l’inconscient le socle d’érudition, lequel permet de s’élever aux dessus des contingences dans l’urgence des combats.
Autrement dit, c’est dans le souvenir inconscient de mes recherches que je puise une amorce de résolution, et cela ne fait pas de moi un « instinctif » ; Herriot est l’auteur apocryphe de la maxime « la culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié », et appliquée à l’Equitation, cela donne « la culture équestre, c’est ce qui me reste (inconsciemment) lorsque je suis confronté à un problème dont j’ai lu quelque part qu’il pouvait se régler comme ci ou comme ça. »
Voilà qui nous ramène à la sempiternelle question « peut-on monter sans les livres », ce qui sous-entend également « sans maître » ? Autrement dit, peut-on monter comme le premier cavalier de l’Histoire du monde, c’est à dire sans aucune autre référence que ses propres sensations ?
Assurément, on peut monter sans les livres, on peut soumettre sans les livres.
Mais peut-on dresser sans les livres, ça, c’est une autre histoire.
cordialement,
kenaz écrit:
Mais peut-on dresser sans les livres, ça, c’est une autre histoire.
Bonjour Xavier,
Bien dit. Et ce que j'aime dans vos interventions c'est que vous parlez bien de dresser, et pas seulement de monter les chevaux.
Très souvent on mélange les deux...
Une citation de mon maître préféré... "il faut monter souvent, sans laisser les livres se couvrir de poussière"
Très important ça aussi, de mon avis, sinon on se perd dans les théories.
Andy
Bonjour à tous
Xavier :
Ce n'était qu'un clin d'oeil et si j'en juge par le petit sourire qui ponctue votre 1re phrase vous l'avez bien compris ainsi.
Si j'ai dis être instinctif c'est parce que je fait plus confiance à ce que je ressent qu'a ce que je lis ou ce que l'on me dit, j'observe les autres ce qui m'apprend beaucoup et surtout ce qu'il ne faut pas faire, j'expérimente sans cesse.
Je n'ai jamais fait d'études et ma culture est très modeste à telle point qu'avant d'intervenir sur ce forum je n'avais écris que pour les besoin de la vie quotidienne (j'espère, pour les lecteurs, ne pas être trop mauvais). Ce sont les chevaux qui m'ont fait « comprendre » la littérature équestre et non l'inverse.
cordialement pierre
En fait, monter à cheval, c'est avoir l'esprit d'un aventurier : explorer des voies dans le jeu du labyrinthe. Les Maîtres ne nous parlent pas des voies qui n'ont pas abouti ( ce que Xavier appelle leurs échecs ), pour ne nous laisser, que les voies positivement explorables. Cela part d'un bon sentiment, mais c'était sans compter sur ce fameux esprit aventurier qui anime bien des cavaliers : et, heureusement, car quelque part la progression est rendue possible.
Quant à " l'instinct selon Pierre ", c'est ainsi qu'Einstein a élaboré la théorie de la relativité, oui, oui, son laboratoire était surtout dans son chapeau ! parce que l'on part d'une idée ou d'une observation et que l'on essaie d'en trouver les lois.
Pierre,
je trouve que vous n'avez pas à rougir de vos interventions, et les autodidactes ont souvent une force de caractère supplémentaire.
Sylvie, il y a une autre forme d'échec, plus discrète ; celle qui consiste à sélectionner les chevaux qu'on va travailler.
Notez que si j'avais la liberté de choisir, je ne prendrais que des chevaux avec lesquels la nature s'est montrée généreuse...c'est plus confortable d'ouvrir un coffre-fort garni qu'une coquille vide... :-)
PS : Andrew, votre "maître" préféré étant visiblement N Oliveira, avez-vous pu l'observer, d'une façon ou d'une autre (autrement que sur des photos, j'entends) ?
bien à vous
xavier Kenaz
Monsieur ***
je remonte à votre attention deux sujets que vous pourrez peut-être lier à votre réponse faite dans le sujet "lettre à MH"
Votre interprétation de son article m'a fait bien réfléchir !
Cordialement
Message édité par: masterai, à: 2007/11/23 21:48
En s’instruisant, non seulement on développe l’esprit critique, ce qui est une chose, mais surtout, on fait passer dans l’inconscient le socle d’érudition, lequel permet de s’élever aux dessus des contingences dans l’urgence des combats.
Autrement dit, c’est dans le souvenir inconscient de mes recherches que je puise une amorce de résolution, et cela ne fait pas de moi un « instinctif » ; Herriot est l’auteur apocryphe de la maxime « la culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié », et appliquée à l’Equitation, cela donne « la culture équestre, c’est ce qui me reste (inconsciemment) lorsque je suis confronté à un problème dont j’ai lu quelque part qu’il pouvait se régler comme ci ou comme ça. »
Je vous remercie d'avoir si bien écrit ce que j'étais incapable d'exprimer clairement à Andy lors de notre dernière rencontre : ce passage est une petite merveille, merci
Sylvie
Sylvie Anduze-Acher
coordinatrice Midi-Pyrénées