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Octobre 2006 - Performances et techniques - Colonel Carde


Sommaire de la catégorie "Editorial" 

    Editorial  Octobre 2006          Performances et techniques 

Les performances sportives ont incontestablement progressé. Résultat de l’amélioration des techniques d’entraînement, on nage plus vite, on court plus vite, on saute plus haut, et les records continuent à tomber dans les disciplines aux résultats quantitativement mesurables par des appareils.

Qu’en est-il de l’amélioration des « techniques » dans les trois disciplines olympiques équestres au regard des performances obtenues de nos jours ?

Concernant le saut d’obstacles Jean d’Orgeix et Pierre Jonquères d’Oriola  exprimaient, il y a quelques mois, leur doute dans un magazine français spécialisé.

Le Concours Complet semble se bien porter et son amélioration ne paraît pas sujet à contestation. Il est vrai que cette discipline comprend une épreuve de Dressage qui rend les résultats plus aléatoires, mais le poids de celle-ci, certes parfois déterminant, est relativisé par celui des deux épreuves reines qui la complètent, le fonds et le saut d’obstacles.

A considérer l’élévation constante des moyennes obtenues par les chevaux de Dressage dans les grandes confrontations européenne et mondiales on pourrait en déduire que cette discipline est également en progrès. Pourtant les avis sont partagés. Tentons d’y mettre notre grain de sel puisque le but premier de cette association est la défense de la belle et bonne équitation,  celle qui se doit de se montrer dans toute sa splendeur sur un rectangle de 20x60 mètres par l’application de sa réglementation en vigueur.

Le résultat en Dressage dépend du jugement, lequel est plus ou moins objectif selon que l’épreuve est constituée de figures imposées ou d’une reprise libre en musique. Mais plus le jugement sera effectué en collant à l’esprit et à la lettre du règlement, moins il sera sujet à caution. Or, quitte à me répéter, je regrette de dire que l’on prend de plus en plus de liberté par rapport à la règle du jeu. Les articles essentiels du règlement international sont peu ou mal connus, donc approximativement appliqués.

Voyons cela de plus près :

Si le Dressage a, entre autres,  pour but de mettre en valeur les allures du cheval, pourquoi voit-on tant de pas latéralisés ou amblés quand le règlement dit que c’est une faute grave ? Pourquoi les « grands chevaux » ont-ils tant de mal à allonger le pas ?

Dans le domaine de la soumission il est dommage que celle-ci se manifeste trop souvent par des rênes exagérément tendues, muserolles bloquées, chanfrein passant souvent derrière la verticale des oreilles. Dommage aussi qu’un champion du monde s’emballe devant des milliers de spectateurs étonnés. Cela pourrait accréditer l’idée que le Dressage n’est qu’un bachotage de mouvements sur une piste rectangulaire.

Mais si le Dressage a aussi pour but de « préserver l’art équestre »- article 419 du règlement- on peut comprendre les interrogations de ceux qui se sont exprimés sur notre forum au sujet de la présentation d’une belle jument grise dans la reprise libre des récents championnats d’Aix La Chapelle. Spectaculaire, surtout dans le jeu de ses antérieurs, celle-ci a terminé a plus de 70 /° alors qu’elle a fouaillé de la queue de façon tout aussi spectaculaire tout au long de sa reprise.

Cela n’a pas impressionné les juges qui ont, pour l’occasion, oublié l’article 416.2.1 que je me permets de rappeler ici :

«  Si le cheval sort sa langue, s'il la passe au-dessus du mors, s'il la remonte complètement, s'il grince des dents ou fouaille de la queue, il y a le plus souvent signe de nervosité, de  contraction, ou résistance de sa part et les juges doivent en tenir compte dans leurs notes, tant pour le mouvement considéré que dans la note d'ensemble "soumission".

On pourrait allonger la liste des écarts constatés par rapport au règlement. Ce n’est pas notre but. Est-ce à dire que tout va mal dans le domaine du Dressage ? Sans doute pas et on prend du bon temps à regarder les reprises de Anky van Grunsven et d’autres concurrents arrivés au top niveau. Mais ce que l’on voit, que l’on admire parfois, c’est autre chose que ce qui est demandé.

 A s’éloigner du règlement on s’éloigne du classicisme qui en est la trame. Quand on s’interroge sur le sens de ce mot classique, Mariette Withages, présidente de la commission de Dressage de la FEI, répond : « ce qui est classique c’est ce qui est dans le règlement ».

A perdre l’aspect harmonieux dans l’expression comme le regrettait Dietricht Von Hopffgarten, dans « The Chronicle of the Horse »  de Janvier dernier on s’éloigne aussi de l’art équestre.

Alors se pose en termes nouveaux la question de savoir quelle équitation pratiquer pour entrer dans ce nouveau jeu. Aujourd’hui le silence des dernières écoles d’équitation qui restent dans le monde est révélateur de leur embarras. Et, comme il est logique de tenter de s’inspirer de ceux qui gagnent, le procédé Deep and Low fait fureur. Ce procédé repose davantage sur l’adresse de celle qui en est la principale  promotrice que sur un fond théorique convaincant. On ne base pas une nouvelle équitation sur un procédé nouveau, mais sur de nouveaux principes.

Pour conseiller des cavaliers dans plusieurs pays du monde j’ai pu mesurer les dégâts irréversibles qui étaient causés par l’emploi de D&L mal compris. Devant l’émoi mondial produit par cette technique il a été demandé à la FEI de prendre position, ce qu’elle n’a pas fait. Bien utilisé par des mains expertes, a-t-elle fait savoir, le procédé n’est pas dangereux. La Palice n’aurait pas mieux dit.

Au-delà de cet épisode pour le moins agité de l’histoire du Dressage c’est l’orientation de toute l’équitation qui est en jeu et, en particulier, le choix des "techniques"  qui assureront tant les succès en compétition   que le bien être des chevaux.  

Ch Carde
Octobre 2006


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